Il y a peu de temps, je me suis posée la question de rester à la maison pour mes enfants. Ca a été un grand dilemme, et aussi un moment de grande réflexion sur le sujet. Qu'est-ce qu'être mère au foyer? Quelle mère au foyer ai-je envie d'être? Celle qui, comme ma mère autrefois, se sacrifie et sacrifie ses projets de vie au nom d'une raison sociale, d'un rôle que la société l'oblige à endosser? Une mère au foyer partiellement? Totalement? Mon homme refusait de me voir "m'enfermer à la maison", moi je me refusais à être "au foyer"...
"Femme au foyer"... Expression qui veut tout dire... La femme a été de tout temps cantonnée à la sphère privée. Ne nous leurrons pas, encore de nos jours les mamans n'ont AUCUNE reconnaissance! Les femmes dites "indépendantes" n'ont AUCUNE reconnaissance! Notre société nous laisse croire que les femmes ont leur place, mais qu'en est-il dans les faits??? Certaines peuvent peut-être encore croire que le genre féminin doit se libérer de son rôle de femme pour atteindre les plus hauts sommets. Devenir tel un homme, pour être acceptée en tant que femme...
Et si on se réappropriait notre féménité! Et si on revendiquait le droit d'être totalement femme! Etre femme entièrement, c'est accepter que nous ayons un cycle différent de celui des hommes, que notre corps fonctionnent différemment, que nous soyons porteuses de vie. Quand la femme devient mère, elle n'est pas seulement mère, elle est alors une flamme, elle porte la vie à bout de bras, elle est indispensable à son enfant ses premiers mois de vie, qu'elle le souhaite ou non, son bébé est totalement dépendant d'elle. Mais de son père aussi, de cet homme qui a dit oui, qui a accepté de devenir papa, en pensant peut-être que sa dame prendrait les rênes de ce rôle-là pour rester, lui, "libre" de sa vie. En admettant qu'ils soient libres... Ce que j'ai beaucoup de mal à croire lorsque je vois ces hommes se battre pour leur profession, pour leur ambition, pour l'argent, je suis persuadée qu'en réalité, ils sont beaucoup plus prisonniers qu'ils ne le pensent... J'invite les hommes qui me liront à réfléchir là-dessus.
Quand je suis devenue maman d'A., la question ne s'est pas posée longtemps : je ne voulais pas être mère au foyer! Rester à la maison, nettoyer, repasser, cuisiner, faire de ce lieu de vie un sanctuaire de l'ordre bien-pensant et entrer dans la fameuse case "ça y est, vous êtes une mère parfaite!", très peu pour moi. Je m'excuse d'avance auprès des mères au foyer, et notamment auprès de ma maman, mes propos peuvent sembler durs, mais il s'agit de mon ressenti. Peut-être parce que j'ai justement vu ma maman se sacrifier. Attendre gentiment mon papa dans une maison immaculée, le repas préparé, les yeux bien maquillés, sans être reconnue ni dans son rôle de femme, ni dans son rôle de mère. Mais pour elle, c'était évident de le faire, en revanche elle ne s'y est pas épanouie, c'est du moins ce que je ressens quand nous en parlons. Je ne parle pas à sa place, ni à la place d'autres mamans qui pourraient s'identifier à cette situation, j'expose seulement mon point de vue sur une situation que j'ai vécue. Donc en devenant moi-même maman, j'ai fui très vite la maison, et j'en étais heureuse, je ne regrette pas, parce qu'à ce moment-là, c'était ce qu'il me semblait le mieux pour moi-même et donc pour mon bébé. Si je m'étais enterrée à la maison, je me serais fermée au monde, me serais retrouvée à tourner à rond pour ne pas voir la vérité en face. En trois mois, j'ai eu le temps de m'ennuyer. Ben oui, un bébé de trois mois, ça ne vous fait pas la conversation, ça ne vous gratifie pas d'être une bonne mère. Oui parce qu'en plus, on est en mal de reconnaissance...
Mais A. a grandi... D'une situation unilatérale, nous sommes passés à une relation de partage. J'ai très vite suivi mon instinct qui me disait d'écouter ce petit bonhomme, de ne pas me figer dans mon rôle d'adulte, de le laisser me guider sur le chemin de maman. Il m'en apprend autant que je lui en apprends. Mon regard sur la femme au foyer a commencé à changer : je n'avais pas plus envie de faire le ménage ou le repassage ou la cuisine (quoique je fais d'énormes progrès de ce côté-là!) mais je commençais à me réconcilier avec le concept de maman... Etre maman, ça, ça avait du sens pour moi! Me remettre en question, réfléchir à ce dont mon fils a besoin, à ce que je peux lui apporter, à ce qu'il m'apporte à moi. Etre la main qui l'aidera à tenir debout et à marcher, en échange de ce regard qui me fait grandir...
Et T. est arrivé. Avec tout le cheminement que sa gestation a signifié. Sa venue au monde était déjà une réflexion sur ma capacité à être mère ET à être femme. Après cette naissance, ou plutôt cette renaissance, mon initiation a continué de suivre son cours...
Quand on devient maman, on devient un pilier. Nos enfants vont s'appuyer sur nous. On peut décider de se battre contre ça, de ne pas être un pilier. Ou de laisser cette responsabilité nous écraser.
Mais il y a un autre chemin. On peut être un pilier, qui tient bon parce que d'autres piliers le soutiennent. Le rôle de notre homme est primordial. Mais le rôle que nous donnons à nos enfants aussi! Etre entièrement mère, pour redevenir entièrement femme, le voilà mon chemin. Bien que j'aie finalement décidé de reprendre le travail, je sens au plus profond de moi que c'est ma voie!
Etre une "flamme au foyer", qui illumine et qui réchauffe, qui se nourrit de l'amour des autres et des expériences vécues pour s'épanouir... Et être reconnue pour ça! Qu'on n'entende plus dire qu'une femme qui reste à la maison est une faignasse qui se la coule douce! Qu'au contraire des regards admiratifs se tournent vers elles en s'exclamant : "Elle est mère au foyer! Quel travail! Quelle force! Quelle art de vivre!" Oui, être maman est un art de vivre. Et être une maman, c'est être une femme!
Merci à Catherine Carrère qui m'a soutenue et ouvert les yeux, elle qui m'a parlé de "flamme au foyer", qui fut une véritable révélation pour moi!
Merci à mon fils de ruer dans les brancards de ma vie et de me pousser à me remettre sans cesse en question.
Merci à mon Titou pour m'avoir prouvé que je pouvais être une femme-mère heureuse et épanouie.
Merci à mon homme de partager mon point de vue et de m'épauler avec beaucoup de force et d'amour.
A vous toutes, les mamans, les flammes, au foyer ou pas.
